Orthophonie

Published on 15 mai, 2014

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Une orthophoniste avec la dysphagie

Par Jennifer Sweeney, Orthophoniste

J’ai toujours cru que je pourrais prendre soin de moi lorsque je serais à l’hôpital, pour autant que je conserve la totalité de mes capacités de cognition et de communication. Ce que je n’avais pas prévu, c’est que je développerais une condition neurologique atypique.

En 2010, j’ai senti une douleur très vive au visage. Je savais que, chez la plupart des femmes de 50 ans, la douleur est attribuable à une condition qualifiée de névralgie du trijumeau : la démyélinisation du nerf trijumeau par un vaisseau sanguin qui frotte sur la zone située à proximité du tronc cérébral. Mais j’étais également consciente qu’il pouvait s’agir de problèmes dentaires, de troubles de sinus, d’une tumeur au cerveau ou d’une sclérose en plaques (SP).

J’ai demandé à plusieurs médecins de m’examiner de la tête aux pieds, y compris des neurologues. C’était une procédure de dépistage jugée adéquate pour toute affection touchant mes nerfs crâniens, et mes médecins ont commandé une IRM non urgente. Tandis que je patientais pour l’IRM, j’ai commencé à éprouver des problèmes gastro-intestinaux, y compris la gastroparésie et le reflux, surtout durant la nuit. J’ai ensuite vécu un important inconfort dû à la constipation. J’en ai parlé à un ami pédiatre qui a suggéré qu’il puisse s’agir de la SP. Le neurologue et le gastroentérologue que je consultais ont tous deux rejeté cette possibilité.

Je ressentais une douleur quasi constante, mais la douleur empirait lorsque je mangeais ou que je me brossais les dents. J’ai commencé à avoir des difficultés à avaler des comprimés vu qu’ils se logeaient dans mon œsophage et qu’ils refoulaient parfois. Je continuais d’essayer de comprendre ce qui n’allait pas chez moi. Cela semblait assurément être un problème neurologique mais le médecin traitant que je consultais ne prenait pas mes symptômes au sérieux. Lorsque j’ai finalement abouti à l’hôpital avec une malnutrition grave, j’avais bon espoir d’obtenir enfin l’aide dont j’avais besoin.

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Jennifer Sweeney en janvier 2012.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

J’étais sous les bons soins d’un docteur en médecine interne, qui était un spécialiste en troubles de l’alimentation. J’ai continué d’avoir des difficultés à avaler les comprimés. Une nuit, un de ces comprimés s’est trouvé coincé dans mon sinus pyriforme gauche mais j’ai pu manuellement l’extirper de manière à pouvoir l’avaler de l’autre côté. J’ai pris conscience que, dans ma situation affaiblie, j’aurais intérêt à introduire les comprimés du côté contraire à l’emplacement de la sonde d’alimentation. J’ai signalé cet incident à l’infirmière et le lendemain un médecin résident est entré dans ma chambre pour vérifier mon réflexe de nausée. J’avais espéré qu’un orthophoniste passerait me voir, mais aucun n’est venu à mon chevet. À ce moment-là, je savais que je devais sortir de là vu que le personnel soignant avait déjà décidé que mes problèmes étaient tous « dans ma tête ».

Lorsque j’ai parlé au médecin de mon trouble de la déglutition, elle l’a qualifié de trouble de la déglutition « perçue ». J’ai reçu un diagnostic de « dyspepsie fonctionnelle » et on m’a renvoyée à la maison avec les recommandations de participer à une thérapie comportementale cognitive et de me présenter à des rendez-vous de suivi auprès du médecin en troubles de l’alimentation et d’une nutritionniste.

Lorsque j’ai finalement passé une IRM du cerveau cinq mois plus tard, j’avais des lésions au tronc cérébral qui expliquaient la douleur au côté droit du visage (le pont de varole — le nerf trijumeau) et les problèmes de la motilité gastro-intestinale (la moelle ou le nerf vague). Il m’a fallu six autres mois pour contourner le neurologue que je consultais avant de recevoir un diagnostic officiel auprès de la clinique de SP : oui, j’avais la sclérose en plaque.

Mon cas continue d’être très atypique vu que je peux toujours subir un examen neurologique de la tête aux pieds, sans aucun symptôme observable.

J’ai l’espoir que mon récit raffermira votre détermination à éduquer les médecins et les étudiants en médecine et à trouver des façons d’évaluer chaque patient qui se plaint de problèmes de la déglutition. Je sais que si j’avais obtenu les services d’un orthophoniste dans le contexte hospitalier, ma SP aurait fait l’objet d’un diagnostic beaucoup plus tôt.

Si mon récit vous intéresse, vous pouvez lire davantage à ce sujet sur mon site Web, à www.jennifersweeney.ca

Légende de l’image de l’article :
Jennifer Sweeney et son mari Daniel à Long Island (New York) en mai 2013.

 

Jen Sweeney Portrait

Jennifer Sweeney, O
jsweeney@telus.net

À propos de l’auteure :

Jennifer Sweeney, O, a travaillé comme orthophoniste et experte-conseil pendant 20 ans, travail dans le cadre duquel elle a aidé les enfants d’âge préscolaire, les jeunes adultes et les personnes âgées dans le système de soins de santé et dans sa pratique privée. Son travail de consultation visait principalement la collectivité sans but lucratif de la Colombie-Britannique. En 2000, Jennifer a créé le BC Aphasia Centre pour appuyer un nombre estimatif de 10 000 Britanno-Colombiens vivant avec l’aphasie. Elle a pris sa retraite de son exercice clinique actif en 2007 mais a conservé un petit cabinet et sa certification professionnelle jusqu’en 2011. Elle vit à Vancouver (BC) avec son mari, Daniel.

 

 

 

 




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