Orthophonie

Published on 9 août, 2013

0

Supports numériques et acquisition du langage

Par Dre Christina Tausch, Ph. D. ; Kathrin ReesCandidate au Ph. D. ; Sarah Justine Leduc-Villeneuve, B. Sc. ; Dre Aparna Nadig, Ph. D. et Dre Susan Rvachew, Ph. D., O(C)
 
Le présent article a été republié à partir du numéro d’été 2013 du Communiqué.
 
Remarque : Le présent article a été publié à l’origine lorsque Orthophonie et Audiologie Canada (OAC) portait la dénomination sociale « Association canadienne des orthophonistes et audiologistes (ACOA) ».

De nos jours, les parents ont vent de nombreux messages contradictoires au sujet de l’exposition de leurs enfants aux supports numériques. Certaines sources vantent les mérites des livres électroniques et des jeux éducatifs pour l’acquisition du langage oral et écrit de leur enfant. D’autres sources dénoncent les dangers d’un « temps de visionnement » démesuré pour la santé mentale et physique de leur enfant. Les orthophonistes sont confrontés au défi de résoudre les questions et les préoccupations de ces parents grâce à des renseignements fondés sur des données probantes.

Les données probantes sont des renseignements nets à propos de l’importance d’une lecture partagée comme moyen de promouvoir l’acquisition du langage. Nous savons à partir de décennies de recherche que le langage de l’enfant et que son développement cognitif sont tributaires d’un apport en langage adulte riche, surtout avant l’âge de trois ans. La lecture partagée offre une exposition particulièrement riche au langage contextualisé et décontextualisé. Les livres d’histoire établissent un climat propice aux discussions sur les évènements qui se produisent dans la vie de l’enfant et qui enrichissent encore plus l’acquisition du langage oral de l’enfant. La conversation jumelée à une exposition à l’imprimé offre une base sur laquelle asseoir l’émergence des aptitudes à l’alphabétisation.

Les études montrent également que le rôle de l’enfant dans l’amorce et dans le maintien des virages interactionnels avec leur partenaire de lecture est tout aussi important que l’apport au langage adulte. Par conséquent, les orthophonistes peuvent promouvoir l’acquisition du langage en enseignant aux parents et aux préposés aux soins de l’enfant à utiliser les stratégies de lecture dialogique comme celles exprimées dans la vidéo liée au présent article. Lorsque les adultes utilisent ces techniques, tous les enfants en bénéficient, y compris les enfants de classe moyenne ayant des compétences langagières typiques ou déficientes et les enfants issus de milieux résidentiels défavorisés. Dernièrement, nous avons montré que la lecture dialogique peut constituer un pan utile d’une intervention auprès des enfants ayant un trouble phonologique du développement.

De plus en plus, les enfants assistent à des narrations sous forme de vidéos ou de supports numériques, par exemple, la télévision ou les livres électroniques. À la lumière des études de recherche réalisées au cours des dix dernières années, l’Association américaine de pédiatrie a systématiquement dissuadé l’utilisation des médias chez les enfants de moins de deux ans et il en est de même de la Société canadienne de pédiatrie qui recommande aux parents de restreindre l’exposition de leur enfant à ces types de supports. L’Académie émet des réserves au sujet des effets néfastes sur la santé et sur le développement, et cite des études qui révèlent que le temps de visionnement diminue grandement le temps que les enfants consacrent activement à interagir avec les moniteurs.

Bien que l’examen de recherche effectué par l’Académie porte principalement sur la télévision et ne traite pas expressément des livres électroniques, les parents ont nettement encaissé son message général et l’ont généralisé aux domaines où la recherche fait défaut. Les enquêtes révèlent que certains parents hésitent à utiliser les livres électroniques, même avec les enfants plus âgés, en raison des préoccupations liées à l’exposition excessive au temps de visionnement. Même si les parents peuvent chercher à restreindre l’exposition de leur enfant, les supports numériques sont omniprésents dans la société moderne. Par conséquent, une approche parallèle sur la question peut déterminer comment utiliser ces outils pour que leurs avantages soient valorisés et que leurs inconvénients soient limités. Les livres électroniques peuvent-ils être conçus de sorte que les interactions conversationnelles entre le parent et l’enfant soient encouragées plutôt que dissuadées? Les animations contenues dans les récits électroniques peuvent-elles être conçues de manière à améliorer la compréhension de l’histoire et à minimiser les distractions par rapport à la narration?

Nous avons dernièrement reçu une subvention du Conseil de recherches en sciences humaines pour étudier les interactions durant la lecture partagée lorsque les dyades adulte-enfant utilisent les livres électroniques par opposition aux livres conventionnels. Ce projet, mené sous la direction de Susan Rvachew, vise à créer des lignes directrices pour l’amélioration et l’utilisation des livres électroniques pour enfants à la maison et à l’école. Un partenariat entre l’industrie (Tribal Nova), le secteur des organismes à but non lucratif (Centre for Literacy) et le milieu de la recherche (Child Phonology Lab, Psychology of Pragmatics Lab) fait en sorte que nos résultats de recherche seront mobilisés rapidement au profit des Canadiens et des Canadiennes. Nous échangerons les renseignements à propos des supports numériques, notamment, par l’utilisation de notre blog. Nous espérons que vous le visiterez pour en apprendre davantage sur le sujet.

Resources

Cliquez ici pour visualiser JoAnne lisant « Splat the Cat » à Thomas, en se servant des questions journalistiques, des questions ouvertes et d’un guidage de distanciation pour promouvoir l’engagement et l’acquisition du langage chez son enfant.

 

À propos des auteures :

Christina Tausch.jpg

Dre Christina Tausch, Ph. D.
christina.tausch@mcgill.ca

Christina Tausch est agrégée postdoctorale à l’École des sciences et des troubles de la communication à l’Université McGill. Elle est actuellement embauchée comme coordinatrice du projet « Impact of digital tablets on shared reading interactions and outcomes » (Incidence des tablettes numériques sur les interactions et les résultats de la lecture partagée). Ses champs d’intérêt en recherche comprennent l’acquisition du langage dans des contextes unilingues et bilingues, l’acquisition de l’alphabétisation, l’intervention en lecture, la communication suppléante et alternative (CSA), et l’offre de services-conseils aux personnes ayant des troubles de communication et à leurs familles. Mme Tausch a obtenu son Ph. D. de l’Université d’État de la Louisiane en 2012. Son mémoire portait sur une intervention en lecture syntaxique pour améliorer la compréhension de l’écrit chez les apprenants de l’anglais comme langue seconde.

Kathrin Reese

Kathrin Rees, candidate au Ph. D.
kathrin.rees@mcgill.ca

Kathrin Rees a reçu sa formation à titre d’enseignante en éducation spécialisée avec un accent mis sur les troubles de développement du langage du Pädagogische Hochschule Heidelberg/Université de Heidelberg, en Allemagne. Elle a enseigné à l’École d’éducation spécialisée de Fribourg (Allemagne) et a travaillé parallèlement en diagnostic et en counselling à un centre d’acquisition du langage chez la petite enfance. Ses travaux de mémoire examineront comment les enfants d’âge préscolaire qui ont un développement typique, qui présentent des troubles de langage et qui sont bilingues s’adonnent à la lecture partagée.

Sarah Justine

Sarah Justine Leduc-Villeneuve, B. Sc.
sarah.leduc-villeneuve@mcgill.ca

Sarah Justine est adjointe de recherche à l’École des sciences et des troubles de la communication à l’Université McGill, où elle s’est également spécialisée en neuroscience. Sa thèse de 1er cycle définitive au laboratoire de la Dre Nadig a examiné comment les initiations, les réponses d’attention conjointe et l’imitation spontanée ont contribué au langage expressif des enfants au développement caractéristique et des enfants souffrant d’un trouble du spectre de l’autisme. Ses principaux intérêts sont le langage, le cerveau et la technologie.

Aparna Nadig

Dre Aparna Nadig, Ph. D.
aparna.nadig@mcgill.ca

Aparna Nadig, Ph. D., est professeure adjointe à l’École des sciences et des troubles de la communication de l’Université McGill. Sa recherche porte sur l’acquisition des compétences en communication sociale et sur le langage et la communication chez les personnes ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Dernièrement, son laboratoire a étudié les processus d’apprentissage des premiers mots chez les personnes ayant un TSA et dans le cadre du développement caractéristique, de la prosodie et de l’échange conversationnel des interlocuteurs ayant un TSA, et l’efficacité d’un nouveau programme de soutien aux transitions chez les jeunes adultes ayant un TSA.

Susan Rvachew

Dre Susan Rvachew, Ph. D., O(C)
susan.rvachew@mcgill.ca

Susan Rvachew, Ph. D., O(C), est professeure agrégée à l’École des sciences et des troubles de la communication de l’Université McGill. Sa recherche met l’accent sur le développement phonologique et les troubles phonologiques, et sur la promotion des interventions efficaces pour traiter les troubles phonologiques chez les enfants et pour prévenir un handicap de lecture chez cette population. Elle est l’auteure de Developmental phonological disorders: Foundations of clinical practice (Rvachew, S. et Brosseau-Lapré, F. (2012)).


Si vous avez une histoire que vous jugez intéressante pour vos pairs et que vous souhaitez la faire paraître dans le Communiqué, veuillez nous la faire parvenir à pubs@sac-oac.ca.




Back to Top ↑